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(rfi) Bombardements en Éthiopie: «C’est un bras d’honneur adressé à la communauté internationale»

 (rfi) Bombardements en Éthiopie: «C’est un bras d’honneur adressé à la communauté internationale»

Les autorités rebelles de la région du Tigré ont accusé l’armée éthiopienne d’avoir à nouveau bombardé mercredi leur capitale Mekele, peu après avoir proposé un cessez-le-feu et des négociations. De source médicale locale, le bilan s’élève à 10 morts et 14 blessés. Le contexte est extrêmement tendu et volatile. Quelles perspectives pour ce conflit, quels objectifs pour les uns et les autres, quelles solutions de sortir de crise ?Pour en parler notre invité, René Lefort, chercheur indépendant spécialiste de l’Ethiopie. Il répond à Sébastien Németh.

RFI: Que pensez-vous de l’attitude du gouvernement fédéral d’Éthiopie qui bombarde 24 heures après la proposition de dialogue des autorités tigréennes ?

René Lefort : En fait, c’est un formidable bras d’honneur adressé à la communauté internationale qui le pressait de saisir le rameau d’olivier en quelque sorte que lui tendaient les Tigréens. Cela veut dire très clairement qu’Abiy Ahmed [Premier ministre éthiopien] ne veut pas une reprise rapide des négociations ni une cessation des hostilités. Il compte toujours avoir une supériorité militaire telle qu’il puisse reconquérir le Tigré. Abiy Ahmed se conçoit comme le chef de l’ensemble de l’Éthiopie unifiée, sous son autorité. Les Tigréens veulent une très forte autonomie. Les objectifs sont absolument incompatibles.

Une indépendance du Tigré ou une autonomie, c’est quelque chose qui vous semble réaliste ?

L’indépendance du Tigré est majoritairement demandée par la population et par les militants. Ce qui freine pour une indépendance, c’est la direction du TPLF [Front de libération du peuple du Tigré] qui, elle, estime qu’il faut que le Tigré reste lié avec l’Éthiopie. Un Tigré indépendant, sans accès à la frontière soudanaise, est quelque chose de très problématique. En revanche, une Éthiopie sans Tigré n’est pas menacée en tant que telle, parce que le Tigré, c’est 6 millions d’habitants seulement sur 110 millions. Et c’est un territoire marginal sur le plan économique. Mais ce qu’il faut comprendre, c’est que ce qui est en réalité en jeu aujourd’hui, c’est la décolonisation de l’empire éthiopien. Est-ce qu’on continuera à avoir un État fort, concentré à Addis-Abeba ou est-ce qu’on aura une confédération extrêmement lâche des divers nations, nationalités et peuples d’Éthiopie ?

Si quelque chose est accordée aux Tigréens, d’autres régions pourraient vouloir la même chose et on risque encore une fois l’implosion du pays ?

Je crois qu’il faut être réaliste : il n’y a plus de lien capable d’unifier l’Éthiopie. Les conflits ont été tellement forts que ce lien n’existe plus. La seule solution, c’est d’aller doucement vers une espèce de confédération éthiopienne, voire quelque chose qui ressemblerait à ce qui réunit les États de l’Union européenne.

Peut-on envisager une paix tant que le président de l’Érythrée, Isaias Afwerki sera là et aura pour ambition de détruire le TPLF ?

Cela est l’obstacle majeur. L’ambition d’Isaias Afwerki est de devenir le patron de la Corne de l’Afrique, de tirer toutes les ficelles. Pour y arriver, il doit détruire le TPLF. Donc, c’est une lutte à la vie à la mort.

Une résistance des Tigréens sur le plan militaire. C’est possible ?

Pour les forces fédérales, il s’agit de conquérir tout le Tigré. La stratégie tigréenne, dans cette phase, consiste à détruire le plus possible de forces fédérales. Et alors de passer à l’attaque pour récupérer des territoires occupés, lever le blocus, etc. Les forces fédérales n’ont pas eu de gains territoriaux pour le moment, ce serait la stratégie tigréenne qui serait la plus efficace.

On voit émerger depuis plusieurs jours de nouveaux acteurs diplomatiques, notamment l’envoyé spécial américain Mike Hammer et Uhuru Kenyatta, le désormais ancien président kenyan, cela peut aider, selon vous ?

L’Union africaine a été tout simplement nulle jusqu’à maintenant, absolument nulle. Olusegun Obasanjo [ancien chef d’Etat nigérian], le médiateur officiel de l’Union africaine, n’a pas dit un mot depuis la reprise de la guerre. Le fait qu’Uhuru Kenyatta revienne en selle pourrait contribuer à une solution africaine, parce que Kenyatta est accepté par Mekele. Maintenant, du côté des Occidentaux, jusqu’où sont-ils prêts à aller ? Abiy Ahmed a démontré qu’il n’avait pas l’intention de négocier sérieusement une cessation des hostilités. Est-ce que la communauté internationale va exercer des pressions sérieuses sur lui ? Jusqu’à maintenant, elle ne l’a jamais vraiment fait.

houssainatou

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