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(Guineenews.org)Boubacar Yacine Diallo parle la presse guinéenne, ses projets et ses relations avec feu Conté

 (Guineenews.org)Boubacar Yacine Diallo parle  la presse guinéenne, ses projets et ses relations avec feu Conté

Dance cette interview accordée à votre quotidien en ligne ce lundi 22 mars 2021, Boubacar Yacine Diallo, le président de la Haute Autorité de la Communication (HAC) rappelle le rôle de régulation qui incombe à son institution, les questions de formation des journalistes, l’opération d’assainissement de la corporation et ses relations avec feu Général Lansana Conté, entre autres.

Guineenews.org : bonjour Monsieur Boubacar Yacine Diallo, vous êtes le président de la HAC. Pouvez-vous, pour commencer, rappeler le rôle de régulation que joue la HAC ?

Boubacar Yacine Diallo : Vous avez raison de poser cette question parce que très souvent, il y a une grosse confusion et parfois de l’amalgame au sujet du rôle de la HAC dans le domaine de la régulation. Je voudrais préciser déjà que la HAC fait la promotion de la liberté de la presse. La HAC doit pouvoir faire éviter un contrôle abusif des médias par les pouvoirs publics tout comme d’ailleurs tout autre pouvoir qu’il soit économique ou autre. Et ensuite, la HAC doit pouvoir réguler le contenu des messages à la fois des médias publics et privés. Et c’est en ce moment que le problème réel se pose. Parce que quand on parle de contenu, on parle du produit du journaliste, ce qu’il a diffusé. Vous savez que la régulation de manière générale repose d’abord sur la liberté de communiquer. Mais cette liberté a son pendant : le droit à une information honnête et fiable. C’est-à-dire autant le journaliste a la liberté de communiquer, autant le citoyen a le droit de la part du journaliste de recevoir une information honnête et fiable. Honnête parce que le journaliste doit être neutre, il doit être indépendant et il doit recouper son information. Et fiable, parce que son information doit reposer sur des faits avérés, sauf s’il décide de faire un commentaire auquel cas il a une certaine liberté d’analyse de points de vue.

Maintenant concernant les plaintes, parce qu’ici quand on parle de régulation, on voit les plaintes parce que la loi prévoit que les journalistes soient sanctionnés à la hauteur de la faute commise lorsque celle-ci ne concerne que l’éthique et la déontologie. Quand ce sont des faits prévus et punis, c’est du domaine de la justice. Je précise, déjà la loi est claire là-dessus, lorsque la justice se saisit, la HAC se dessaisit, même si préalablement elle s’était saisie d’une question. Alors il y a l’auto-saisine. C’est-à-dire que la HAC peut s’autosaisir lorsque par exemple les mœurs sont attaquées, lorsque l’unité nationale est attaquée, lorsqu’il y a des intérêts communs et généraux qui sont attaqués. En ce moment-là, la HAC peut se saisir et sanctionner conformément à la loi. Je précise que les sanctions vont de l’avertissement à l’interdiction.

La deuxième saisine cette fois-ci, ce sont des particuliers qui saisissent la HAC. Vous savez que la loi dispose que quand c’est le Président de la République, c’est le Procureur qui se saisit d’office, lorsqu’il est offensé, injurié, ou calomnié. Et le procureur ne se dessaisit qu’à la demande expresse du président de la République. Pour les autres cas que ce soit un membre du gouvernement ou un député, il faut que sa plainte soit personnelle. Tant qu’il ne porte pas plainte, ni la HAC ni la justice ne peut s’autosaisir. Et lorsque ce sont des chefs d’Etat étrangers, c’est leur Ambassade qui porte plainte.

Tout ceci est règlementé au détail dans la loi. Une fois que la HAC, par exemple, est saisie, elle a une commission d’éthique et de déontologie, une commission juridique, conjointement qui étudient la plainte et qui constatent que le journaliste avait raison dans sa démarche jusqu’à la publication. Dans ce cas, on fait savoir au plaignant qu’à notre avis il n’a pas raison. Et lorsque le plaignant a raison, il est arrivé très souvent que nous fassions la médiation, que le journaliste rectifie l’information. Ça, c’est permis, ce n’est pas honteux. Et très souvent on l’a réussi.

Guineenews.org : il n’est un secret pour personne qu’il y a aujourd’hui un besoin de formation au niveau de la presse guinéenne. Pendant que vous étiez à la tête du CNC, il y avait une série de formations. Est-ce que de tels projets sont envisagés dans les mois à venir ?

Boubacar Yacine Diallo : vous avez eu raison de l’évoquer. Je voudrais d’ailleurs rappeler que la loi a créé une commission qui se charge de la certification des diplômes et des instituts de journalisme. Cette commission a déjà été constituée, elle doit être en inter-commission avec une commission que le ministère de l’Enseignement Supérieur devrait mettre en place. Je pense que très prochainement cette commission va s’occuper de la certification des instituts et des diplômes de journalisme. Ce que j’envisage au niveau de la HAC, c’est que déjà nous avons pris contact avec quelques bailleurs de fonds pour les intéresser à la formation et au recyclage des journalistes et des techniciens.

Nous prévoyons de le faire avec les associations de presse forcément, et aussi avec le ministère de la Communication à travers son centre de formation et de perfectionnement. Ici à la HAC même, j’envisage d’aménager la grande salle, la salle historique pour que périodiquement, des petites rencontres s’y tiennent, par exemple une rencontre avec des journalistes de la presse en ligne, avec des procureurs, la direction de la Police judiciaire, la Gendarmerie pour qu’ils débattent des limites à ne pas franchir par chacun d’eux. Je suis en train d’aménager cette salle à cet effet. Une fois que la salle sera prête, on verra un peu comme les mercredis du livre de l’Harmatan, on choisira un jour ou dans la semaine ou toutes les deux semaines pour les professions avec tous les acteurs de la communication afin qu’ils puissent se retrouver et échanger sur un sujet ou sur un autre qui intéresse le domaine.

Guineenews.org : la HAC a aujourd’hui 30 ans d’existence. Quel bilan faites-vous de l’évolution de la presse guinéenne ?

Boubacar Yacine Diallo : Le premier collège du Conseil national de la communication (CNC) a été installé en octobre 1992. Je figurais parmi les trois membres désignés par le président de la République. Je suis revenu en 2005 au Conseil en tant que président de l’Institution. Et me voici de retour pour être cette fois président de la Haute Autorité de la communication (HAC). Vous imaginez l’étendue de ma joie d’être au service de la presse.

S’agissant de l’évolution de la presse en Guinée, je dirais que le secteur a connu de grands changements avec notamment l’arrivée de la presse écrite indépendante en 1991, la libéralisation de l’espace audiovisuel en 2005 et la dépénalisation des délits de presse en 2010. Aujourd’hui notre pays compte plus de cent radiodiffusions libres, une dizaine de chaînes de télévisions privées, une bonne centaine de sites d’information. Globalement le bilan est bon, même si on peut constater encore des difficultés parfois insurmontables que les médias rencontrent.

Guineenews.org : Vous êtes à la tête de l’Institution de régulation de la presse pour la deuxième fois. Qu’est-ce que cela représente pour vous ?

Boubacar Yacine Diallo : Cela représente un honneur pour moi mais aussi un chapelet de défis à relever. Je suis galvanisé à l’idée que je peux apporter ma modeste expérience dans le domaine de la régulation caractérisé par la liberté de communiquer avec son pendant le droit à une information honnête et fiable. Mes collègues et moi travaillons à aider la presse à se développer.

Guineenews.org : Dès après votre prise de fonction, vous avez entrepris une opération d’assainissement de la corporation à travers l’enrôlement des journalistes. Quelles en sont les motivations ?

Boubacar Yacine Diallo :  Vous avez raison, lors de ma prise de fonction j’ai fait la promesse d’engager une vaste opération d’assainissement du secteur. Quelques mois seulement après, l’opération de délivrance de la carte de presse professionnelle a connu un franc succès notamment en ce qui concerne l’enrôlement biométrique.

A date, nous avons enregistré plus de 4000 postulants dont 2300 enrôlés. Nos équipes ont enrôlés 800 journalistes et techniciens à l’intérieur du pays et 1500 dans la zone spéciale de Conakry. L’originalité de l’opération est double : la carte est gratuite et les postulants sont enrôlés aux sièges de leurs médias. Au moment où je vous parle, le dépouillement a commencé et la commission de délivrance de la carte travaille sans relâche.

Comme vous le voyez, la principale motivation de cet assainissement, c’est d’identifier tous ceux qui remplissent les critères pour jouir du statut de journaliste afin qu’ils profitent des droits attachés et éloigner tous ceux qui ont échoué dans la vie et qui sont venus polluer les milieux de la presse.

Guineenews.org : Où en est-on avec l’émission de la nouvelle carte de presse ?

Boubacar Yacine Diallo : Nous comptons délivrer les premières cartes le 3 mai à l’occasion de la célébration de la journée mondiale de la liberté de la presse. L’imprimerie est prête, la commission continue l’examen des dossiers et le conseil se réunira très prochainement pour valider les dossiers retenus.

Guinéenews.org : Que pensez-vous de la floraison des radios et télévisions privées en Guinée ?

Boubacar Yacine Diallo : Vous le savez, peut-être, j’ai présidé la commission technique de rédaction des textes sur la libération de l’audiovisuel sous la supervision du ministre Kiridi Bangoura qui présidait la commission interministérielle.

Donc c’est tout heureux que je vive cette floraison. J’espère simplement que la liberté des médias s’exerce dans la plus grande responsabilité.

J’espère également que les patrons de presse s’efforceront à améliorer les conditions de vie et de travail de leurs personnels.

Guineenews.org : vous êtes journaliste de profession. Parlez-nous un peu de vos débuts dans la presse ?

Boubacar Yacine Diallo : Mes débuts ? (Rires). J’ai commencé par la presse universitaire à l’Institut polytechnique de Kankan (IPK) puis à l’université Gamal Nasser de Conakry. J’écrivais un article par jour. Étudiants et professeurs venaient me lire sur notre journal mural. C’est l’une des raisons pour lesquelles j’ai été choisi pour aller en Roumanie faire des études en journalisme à l’académie des sciences politiques de Bucarest. Une fois la licence obtenue, j’ai décidé de regagner mon pays, contrairement à plusieurs de mes jeunes compatriotes restés en Europe.

Mes débuts à la radio nationale ont été difficiles. J’ai été isolé un bon moment avec mon diplôme de journalisme. Certains responsables craignent déjà pour leur poste. Entre-temps, le régime change et j’introduis l’investigation comme genre. Je commence par traiter les faits divers puis traquer les bandits à col blanc. Je bénéficie vite de la protection du président CONTE. Par la suite, je commence à couvrir les activités du Chef de l’Etat avec d’autres éminents confrères. Et la suite vous la connaissez.

Guinéenews.org : Pouvez-vous nous expliquer vos relations avec le feu Général Lansana Conté avec qui vous auriez eu des rapports particuliers ?

Boubacar Yacine Diallo : Le président CONTE admirait mon attachement au travail bien fait et mon honnêteté, ce sont ses propres termes. Je pouvais lui dire ce que personne n’osait et parfois même sur les antennes de la RTG. Il m’acceptait tel que je suis et m’exhortait à toujours mieux faire. Il me prenait comme un fils et cette relation me convenait parfaitement.

Guinéenews.org : Quels souvenirs retenez-vous du Président Conté ?

Boubacar Yacine Diallo : Des souvenirs impérissables ? Il y en a. C’était un homme entier, généreux, en même temps un homme de principe. Il ne savait ni mentir ni tricher et il savait discerner très vite le vrai du faux. C’était un homme d’Etat tout court.

Pour les anecdotes : Un jour, il m’a vu bien cravaté à l’aéroport puis il lance : mon Dieu regardez monsieur Diallo, il est bien ligoté ! Tout le monde s’est mis à rire à commencer par lui-même ; ou lorsqu’il me prêtait son hélicoptère pendant qu’il prenait la route, lors de ses tournées à l’intérieur du pays ; ou encore lorsque dans l’avion présidentiel il venait s’asseoir à côté de moi chaque fois qu’il voulait fumer…

Guinéenews.org : Vous avez été Directeur général de l’ORTG avant de rendre démission par la suite de vos fonctions. Quelles en étaient les raisons de cette démission ?

Boubacar Yacine Diallo : Je précise que je suis jusqu’à présent l’unique directeur général de l’Office de la radiodiffusion télévision guinéenne (ORTG). Hélas, en février 2000, j’ai démissionné à la surprise générale. Vous savez, je suis viscéralement jaloux de ma liberté que je ne saurais troquer. Et des individus mal préparés au changement démocratique voulaient la brider. Je suis parti sans regrets d’ailleurs.

Et comme Dieu est juste, ceux qui m’avaient poussé dehors n’ont pas pris le dessus. Je suis encore là plus haut. C’est la volonté du Bon Dieu. Je le remercie.

Guinéenews.org : Vous n’êtes pas que journaliste, vous êtes aussi écrivain. Qu’est-ce qui vous a motivé à choisir cette option ?

Boubacar Yacine Diallo : Je suis devenu écrivain par la force du destin. J’ai vécu au cœur des pouvoirs qui se sont succédé, soit comme journaliste soit comme haut commis de l’Etat. J’ai vécu des faits importants qui méritent d’être consignés. J’écris donc au présent sur des sujets politiques. C’est tout.

Guineenews.org : Quelle image voudrez-vous que vos compatriotes gardent de vous après votre retraite ?

Boubacar Yacine Diallo : Modestement, je souhaite laisser l’image d’un homme intègre qui aura été au seul service de son pays.

Interview réalisée par Guilana Fidel Mômou

houssainatou

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