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(Reseauinternational)Macron et Merkel l’échec d’un « nouveau partenariat »

 (Reseauinternational)Macron et Merkel  l’échec d’un « nouveau partenariat »

par Alexandre Lemoine.

En 1963, la France et l’Allemagne ont signé le Traité de l’Élysée, qui a posé les bases des relations amicales entre les deux pays voisins. Ce document non seulement a posé les bases pour un rapprochement entre l’Allemagne et la France, mais il a également marqué une étape importante dans l’unification de l’Europe.

Le président français Emmanuel Macron, prenant ses fonctions au printemps 2017, a désigné le « nouveau partenariat » entre Berlin et Paris comme étant l’une des priorités de la politique étrangère de sa présidence. Maintenant, à un peu plus d’un an de l’échéance de son mandat présidentiel et à quelques moins des élections du nouveau chancelier fédéral en Allemagne, il est possible d’affirmer que le plan d’établissement d’une coopération étroite et à long terme entre les deux puissances européennes a échoué.

Le contraste entre le dirigeant français ambitieux et souvent impatient, d’un côté, et la chancelière allemande généralement rationnelle, de l’autre, qui est flagrant en comparant ces chefs d’État, cache des raisons réelles et plus profondes des différends que même le traité de coopération d’Aix-la-Chapelle signé en 2019 n’a permis de surmonter. Berlin et Paris perçoivent différemment les changements structurels dans les relations internationales et, en conséquence, voient des repères globaux différents dans la politique étrangère.

Lors de sa campagne électorale Emmanuel Macron a déclaré que « le renouvellement européen n’est possible qu’à condition d’une coopération étroite entre Berlin et Paris ». Quelques jours après les législatives allemandes de septembre 2017, lors de son discours à la Sorbonne le dirigeant français a déterminé la ligne du « nouveau partenariat » entre les deux États.

Quelques années plus tard, à la Conférence de Munich sur la sécurité, en février 2020, quand le président français a formulé des reproches envers Berlin, il est devenu clair que le « nouveau partenariat » a échoué. La critique portait sur l’intégration européenne et appelait à une plus grande autonomie de l’UE.

En novembre 2020, Emmanuel Macron a débattu avec la ministre allemande de la Défense Annegret Kramp-Karrenbauer au sujet de « l’autonomie stratégique ». Les politiques et les médias des deux côtés du Rhin accusaient la chancelière allemande de l’échec du programme proposé par le président français et pour la coopération franco-allemande insuffisante. Le chef de l’État français s’est prononcé plusieurs fois publiquement sur l’inaction d’Angela Merkel, décrivant, notamment en été 2019, les relations avec l’Allemagne comme une histoire « avec une attente permanente de réponses par Paris ». Le dirigeant français avait notamment remarqué que l’échec des relations bilatérales serait une « erreur historique ».

Cependant, à la hausse de la tension entre Berlin et Paris a contribué non seulement et pas tant l’absence de réponses du gouvernement fédéral. C’est plutôt la France macronienne elle-même qui a pris plusieurs décisions en politique étrangère qui n’ont pas simplement surpris, mais parfois irritaient même Berlin : certaines actions étaient engagées à l’insu de l’Allemagne, d’autres allaient à l’encontre des intérêts nationaux allemands ou encore exprimaient la réticence de la France de mener un dialogue objectif. Ces décisions concernaient le règlement de la crise en Libye, les aspirations de la France à faire sortir les questions relatives à la sécurité hors du cadre de l’UE en tant qu’organisation, la zone euro et ses règles financières, qualifiées par Paris de « vestiges du passé », l’OTAN, la Turquie et la Russie.

La politique étrangère de Emmanuel Macron et sa politique de sécurité sous-entendent que l’Europe doit devenir plus forte et indépendante au vu de la conjoncture internationale qui change. Le dirigeant français cherche à empêcher la transformation de l’Europe en une monnaie d’échange dans les relations entre Pékin et Washington, quand l’attention principale des États-Unis se déplace dans la région Asie-Pacifique.

Afin d’y parvenir, Emmanuel Macron pendant toute sa présidence appelait à « diversifier les formats » et à une coopération européenne pragmatique en dehors des organisations existantes. Comme le prouve l’Initiative européenne d’intervention annoncée par le président français en septembre 2017 et initiée par un protocole d’intention signé par les ministres de la Défense faisant partie de la coalition. De facto, l’initiative d’Emmanuel Macron contournant l’UE et l’OTAN.

À noter également la perception de l’OTAN par le chef de l’État français en tant qu’alliance purement « militaire » et non « militaro-politique », dont les ressources, selon Paris, doivent servir uniquement à garantir la défense territoriale de l’Europe. Ce qui met en évidence l’une des principales divergences dans les positions entre l’Allemagne et la France. Alors que le gouvernement allemand, au contraire, souligne l’importance et l’équivalence de la dimension aussi bien politique que militaire de l’OTAN. L’Allemagne considère l’Alliance comme un forum central de la coopération transatlantique, tandis que la France préfère construire ses relations avec les États-Unis en dehors de l’organisation.

L’Allemagne a également l’intention de conserver le « format statu quo » par rapport à la zone euro, en continuant de considérer l’union monétaire comme une plateforme primordiale pour la coordination de la coopération financière européenne. Le président français a appelé plusieurs fois à un écart des règles européennes, tout en indiquant que l’Allemagne est un « pays à qui la zone euro a profité le plus ». Paris et Berlin aspirent à un niveau différent « d’intégration fiscale », tout comme ils divergent sur l’admissibilité de l’interventionnisme économique au niveau paneuropéen. De plus, ils voient différemment le rôle de la Banque centrale européenne (BCE) et sa politique monétaire. Avec la « pandémie », les contradictions économiques n’ont fait que se renforcer, et dans l’agenda actuel aucun thème de « nouveau partenariat » potentiel n’est à prévoir.

L’insatisfaction générale de l’Allemagne et l’incohérence des tâches pragmatiques du gouvernement d’Angela Merkel avec le modèle utopique placé par Emmanuel Macron à la tête de son concept de la politique étrangère poussaient le dirigeant français à engager des actions qui n’ont fait qu’exacerber l’incompréhension entre les deux pays européens.

Comme en témoignent les méthodes de règlement de la crise en Libye. La ligne loyale adoptée par Paris vis-à-vis de Khalifa Haftar a contribué à une escalade du conflit et à une plus grande ingérence de la Russie et des Émirats Arabes Unis avec une perte factuelle de l’influence européenne.

Par ailleurs, Berlin a été surpris par la position adoptée par le dirigeant français en août 2019 vis-à-vis de Moscou. La volonté d’Emmanuel Macron de dialoguer avec la Russie s’inscrivait dans l’utopie de la politique étrangère du chef de l’État français et s’expliquait par l’aspiration à détourner Moscou du renforcement de la coopération avec la Chine. Comme le fait remarquer le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung, « le soutien par le président de la République française de la politique de sanctions contre la Russie, les conséquences de « l’affaire Navalny », ainsi que la situation avec l’Ukraine n’ont pas poussé le président à renoncer foncièrement à sa ligne de rapprochement avec Vladimir Poutine ». À noter que le gouvernement d’Angela Merkel ne critique pas en soi l’établissement du dialogue avec la Russie, mais l’implication insuffisante de l’Allemagne à l’élaboration d’une approche commune.

Le dossier turc laisse également son empreinte sur les relations bilatérales en dévoilant à part entière la spécificité du comportement des deux pays : d’un côté, l’Allemagne avec son approche pragmatique et, de l’autre, la France qui se distingue par une rhétorique brutale et une position radicale. La différence des positions de Paris et de Berlin par rapport à la politique turque a été particulièrement visible pendant les 44 jours de guerre au Haut-Karabakh. Tandis que les Français condamnaient officiellement la Turquie pour le soutien de l’un des belligérants, Berlin préférait garder le silence.

Certes, il est impossible de parler des relations trop tendues entre Berlin et Paris. Mais il serait tout aussi injuste de parler de la mise en œuvre du principe de « coordination des actions » du traité d’Aix-la-Chapelle de 2019, tout comme de la détermination de « points de vue communs sur toutes les questions centrales ».

source : http://www.observateurcontinental.fr

houssainatou

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