Le président emblématique d’Amazon Jeff Bezos passe la main ce lundi 5 juillet à son dauphin Andy Jessy. Le géant du numérique est aujourd’hui à la croisée des chemins puisqu’il s’apprête à faire face à une nouvelle offensive internationale concernant sa stratégie d’optimisation fiscale. De nombreux défis attendent donc le nouveau patron de l’empire du e-commerce.
Pour le géant de Seattle, l’optimisation fiscale est devenu un sport à part entière. La décision prise la semaine dernière par les pays de l’OCDE qui se sont engagés à mettre en place un impôt mondial sur les sociétés à hauteur 15% vise en particulier le champion du e-commerce dont le chiffre d’affaires s’est envolé durant la crise du Covid-19 pour atteindre 366 milliards de dollars en 2020 – soit l’équivalent du PIB de l’Afrique du Sud.
Le ministre français de l’Économie Bruno Le Maire a rappelé à de nombreuses reprises que la France s’engagerait pour qu’Amazon n’échappe pas à cette réforme fiscale mondiale. Cependant, l’entreprise au sourire jaune ne génère que très peu de bénéfices – 6% environ au niveau mondial en 2020 –, la grande partie de ses marges se concentrant dans les services informatiques, sur le cloud, au cœur de sa stratégie d’expansion. C’est ce que le journal britannique The Guardian a appelé « la brèche Amazon ». Autrement dit, l’entreprise devrait pouvoir échapper à cet impôt mondial sur les sociétés.
Amazon dans le viseur de l’administration Biden
Mais des attaques contre la firme émanent également des États-Unis et de son autorité de la concurrence, la Federal Trade Commission (FTC). La nouvelle présidente Lina Khan, une brillante doctorante de 32 ans passée par l’Université de Yale, a déjà accusé Amazon d’abus de position dominante en 2017 dans un article très remarqué qui expliquait que les lois antitrust américaines n’étaient plus adaptées pour sanctionner l’entreprise.
La riposte n’a pas tardé : Amazon a déposé mercredi dernier une réclamation pour que la patronne de la FTCne se prononce plus à propos des sujets concernant la multinationale.
Le régulateur américain de la concurrence doit aussi examiner le rachat par Amazon il y a un mois des célèbres studios de la MGM pour près de 9 milliards de dollars. Cette opération permettrait à Amazon prime d’étoffer son catalogue en y ajoutant plus de 4 000 films, de quoi concurrencer Netflix dans un secteur que cette plateforme de streaming dominait alors largement. Ces pratiques commerciales qui ont tendance à écraser la concurrence ne passent désormais plus inaperçu auprès du législateur américain.
Que faut-il attendre alors du départ du patron emblématique d’Amazon Jeff Bezos?
Jeff Bezos dit vouloir garder un œil de stratège sur l’empire qu’il a créé il y a tout juste 27 ans, un 5 juillet 1994. Il gardera d’ailleurs un siège de président exécutif du conseil d’administration et sera le principal actionnaire d’un groupe valorisé à 1 700 milliards de dollars.
Jeff Bezos l’a dit lors de l’assemblée générale des actionnaires : il veut se consacrer à d’autres projets, et sans doute au développement de son projet « Blue origin ». Le 20 juillet prochain, il prendra d’ailleurs part au premier vol commercial organisé par cette entreprise spatiale qu’il a fondée. L’homme le plus riche du monde possède en outre le quotidien le Washington Post et dit vouloir consacrer du temps et de l’argent à la lutte contre le réchauffement climatique.
Andy Jassy, son successeur et son deuxième cerveau, ne fait donc que prendre sa suite. Cadre chez Amazon depuis le tout début de l’aventure, le nouveau patron est aussi l’architecte de la réussite des services d’Amazon sur le web, ce qui donne une petite idée de la direction que devrait prendre l’entreprise à l’avenir.
Il devra aussi faire face aux critiques de plus en plus nombreuses sur les conditions de travail de ses salariés. Amazon met en avant un salaire horaire minimum de 15 dollars mais les défenseurs des droits sociaux dénoncent des cadences infernales et une obsession de l’efficacité qui rend les salariés corvéables à merci.
Une image écornée qui pourrait profiter à son principal concurrent, le chinois Alibaba dont le modèle économique a de quoi faire rougir Jeff Bezos, qui devient désormais officiellement le plus riche retraité de la planète.