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(rfi.fr)Merkel, l’heure du bilan: en Rhénanie, les contradictions de la politique environnementale

 (rfi.fr)Merkel, l’heure du bilan: en Rhénanie, les contradictions de la politique environnementale

Angela Merkel, la « chancelière climat » ? A l’heure du bilan, l’action de celle qui a dirigé l’Allemagne pendant 16 ans est plutôt saluée sur la question de l’environnement, notamment avec la sortie du nucléaire. Mais cette politique n’est pas exempte de contradictions. À quelques kilomètres de Cologne, les mines de charbon à ciel ouvert de Garzweiler et la centrale électrique Datteln4 suscitent l’incompréhension des organisations environnementales. Reportage.

Le long des routes, des pancartes nous avertissent qu’il se joue ici un vrai combat. « Défendre la vie n’est pas un crime », « Liberté pour tous les défenseurs du climat », peut-on lire. Quand on arrive aux alentours des mines de charbon à ciel ouvert de Garzweiler en Rhénanie, à quelques kilomètres seulement de l’autoroute, le spectacle et l’ambiance qui s’en dégagent laissent pantois. L’arrêt de l’utilisation du charbon, combustible très polluant et émetteur de gaz à effet de serre, pour produire de l’électricité ne semble pas pour demain. 

Des villages entiers sont devenus fantômes. Les maisons ont été murées, les abribus devenus obsolètes indiquent une nouvelle direction : « Départ pour l’utopie ». Même la croix de village n’est plus sur son socle, remplacée par une croix jaune, « Alle Dörfer bleiben », (« Tous les villages restent »). À la place, il y a des cabanes dans les arbres, des campements de militants écologistes, une véritable ZAD. La profondeur du trou de la mine voisine, 250 mètres à peu près et son étendue, une cinquantaine de kilomètres, exploitée par l’énergéticien RWE ne sont pas moins impressionnants. Ici, on extrait encore le lignite, un combustible hautement polluant pour produire de l’électricité dans les centrales à charbon situées à proximité.

«Défendre la vie n'est pas un crime», «l'activisme du climat n'est pas un crime» disent les écriteaux.
«Défendre la vie n’est pas un crime», «l’activisme du climat n’est pas un crime» disent les écriteaux. © Patricia Blettery/RFI

Fred, 60 ans, militant écologiste, nous fait visiter le village de Lützerath ou plus exactement ce qu’il en reste : « Tant qu’on n’a pas vu ce qu’il se passe ici, on ne peut le croire. Ici, l’année dernière, il y avait encore deux grosses fermes. Elles ont été rasées ». « Notre ligne rouge à nous, c’est celle-là, prévient-il en désignant les petites pancartes positionnées le long d’une ligne symbolique autour de la mine. Pour limiter le réchauffement climatique à 1.5° et respecter l’Accord de Paris l’extension de la mine ne doit pas dépasser cette frontière. La combustion du charbon (lignite) émet beaucoup de CO2. ».

Un peu plus loin, le village de Keyenberg est promis au même avenir. Les volets des maisons sont fermés et il reste peu de traces de vie. Une voiture stationnée devant une longère de briques rouges témoigne de la présence de quelques poches de résistance, des familles qui ont refusé l’indemnité de RWE et n’ont pas souhaité aller vivre plus loin, dans des lotissements neufs.

Les recours en justice des habitants, des communes ou des associations environnementales (Bund par ex) n’ont rien donné et six villages sont encore menacés. Conformément au droit minier applicable, le fournisseur d’électricité RWE a, en effet, le droit d’exproprier les personnes afin d’exploiter le charbon se trouvant sous leurs maisons si cela est nécessaire. Pourtant en octobre 2018, le déboisement de la forêt de Hambach, pas très loin d’ici, située vers Aix-la-Chapelle, toujours par RWE ( 3 900 sur 4 100 hectares défrichés) pour agrandir une énorme mine avait été suspendu. Une victoire symbolique et encourageante.

Ce qui consterne les militants installés dans des cabanes dans les arbres pour protéger la nature et les villages, c’est le double discours d’un gouvernement qui adopte une loi de sortie du charbon,  ferme petit à petit les centrales les plus polluantes, mais continue à agrandir les mines.

Datteln4 ou le paradoxe de la politique énergétique allemande

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Un peu plus au nord, justement, il y a la centrale électrique de Datteln, mise en réseau en mai 2020. Elle fonctionne avec de la houille, un charbon de meilleure qualité que le lignite, qu’elle importe de Colombie et de Russie. Pour compenser sa mise en service, des fermetures supplémentaires de centrales à la houille ont toutefois été programmées pendant plusieurs années. 

Franziska a 26 ans. Elle a grandi dans une famille de Datteln qui se bat depuis 2005 contre l’implantation de la centrale dans la ville de Datteln. « Au-delà du fait que cette implantation a été mise en réseau au moment où l’Allemagne s’engageait à sortir du charbon, que la centrale émet trop de gaz à effet de serre (8,4 millions tonnes de CO2 chaque année selon Fridays for future), la centrale est vraiment source de nuisances pour les gens d’ici. Elle se situe vraiment dans le centre de la ville, quasi dans leurs jardins. De plus, tout près d’ici, il y a un hôpital pour enfants. Cette centrale est une nuisance, car elle dégage des fumées remplies de nanoparticules et qui de plus nous cachent en permanence le soleil ».

Lena Wittekin et Franziska Pennekamp appartiennent au mouvement écologiste de jeunes Fridays for Future.
Lena Wittekin et Franziska Pennekamp appartiennent au mouvement écologiste de jeunes Fridays for Future. © Patricia Blettery/RFI

Une stratégie climatique au gré du vent

Au moment où on rencontre la section de Datteln de Fridays for future, une décision de justice datée du 26 août a établi que la centrale avait été construite illégalement, un coup dur pour Armin Laschet, le Premier ministre de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, l’un des plus ardents défenseurs du projet et candidat à la chancellerie pour la CDU. Dans le même sens, en avril dernier une décision historique de la Cour constitutionnelle allemande de Karlsruhe saisie par des plaintes de familles a reconnu que la loi climat actuelle empiétait sur les libertés civiles des générations futures. Elle a exigé un renforcement de la législation nationale sur le climat.

Trois mois avant les élections, la coalition gouvernementale a donc revu sa copie. En juin 2021, le Parlement a voté une nouvelle loi sur la protection du climat qui prévoit une neutralité climatique d’ici à 2045, cinq ans plus tôt qu’envisagé initialement. Pour Audrey Mathieu de l’ONG GermanWatch, le bilan d’Angela Merkel est très mitigé

Au niveau international, la chancelière a fortement appuyé la négociation du protocole de Kyoto, elle y a longtemps cru, elle s’y est vraiment accrochée. Donc, il faut reconnaître une volonté de tirer vers le haut les ambitions climatiques internationales. Sur le plan européen, notamment l’année dernière, Angela Merkel a facilité une décision assez importante au niveau du Conseil européen sur ces fameux nouveaux objectifs Climat. En décembre 2020, on est passé de moins 40% à au moins 55% de réduction des gaz à effet de serre d’ici à 2030. Mais ces dernières années ont été marquées par une Allemagne qui marquait le pas, une chancelière qui bridait les rênes au lieu d’avoir un rôle moteur en termes de politique climatique. Sur le plan national, il en va un peu de même. Certes l’Allemagne a entamé une double transition énergétique avec la sortie du nucléaire décidée il y a 10 ans et une sortie du charbon. Les énergies renouvelables pèsent plus de 40% du mix électrique, c’est bien, mais il faut aller plus loin. Et la prise de décision de sortir du charbon au plus tard en 2038 est clairement dépassée.

houssainatou

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