par Karine Bechet-Golovko.
Au-delà des quelques déclarations de Zelensky disant chercher la paix, tout en agitant le spectre botoxé d’un conflit direct avec la Russie, les décisions prises par l’Ukraine vont dans un tout autre sens – le renforcement des tensions à l’intérieur du pays et du conflit avec le Donbass. Que ce soit sur le plan linguistique ou militaire, l’Ukraine ne cherche pas l’unité du pays, elle la met sciemment en péril.
Au lieu de remplir ses obligations, le Président ukrainien ne cesse de louvoyer : un nouveau format, de nouvelles rencontres, invoquées puis reportées puis renouvelées, etc. Mais très concrètement, l’Ukraine refuse toujours tout contact direct avec les dirigeants de Donetsk et Lougansk, ils veulent parler à Poutine – car l’Ukraine post-Maïdan a besoin d’agiter le spectre d’un conflit russo-ukrainien, sinon elle perd tout son intérêt sur la scène internationale. Elle continue donc à entretenir les tensions et joue ainsi le rôle qui lui a été attribué sur la scène internationale. Prenons quelques exemples récents significatifs.
Alors qu’elle a de plus en plus de mal à remplir les rangs de l’armée avec les appelés, une nouvelle loi vient d’être signée par Zelensky, qui permet d’enrôler les réservistes sans avoir à déclarer la mobilisation générale – qui ne mobilise plus depuis longtemps. Ayant quelques difficultés à convaincre sa population, l’Ukraine prévoit une responsabilité pénale pour ceux qui voudront y échapper. Par ce geste, le gouvernement maintient la pression sur la population, la met en situation de quasi-guerre sans avoir à prendre la responsabilité d’un véritable état de guerre.
Mais elle ne doit pas aller trop loin. Ainsi, lorsque l’Ukraine demande des armes létales à l’Allemagne, celle-ci se divise. L’ambassadeur ukrainien en Allemagne fait la tournée des cabinets ministériels pour demander un soutien militaire très concret à la marine ukrainienne : des drones sous-marins, des systèmes de lance-missiles, des têtes de missiles, etc. Si le ministre allemand des Affaires étrangères n’est pas très chaud, l’idée, en revanche, a beaucoup plus au ministre allemand de la Défense et au président du Comité parlementaire des Affaires étrangères.
La question de la souveraineté d’un pays qui va quémander des armes à l’étranger pour sauver sa flotte n’a pas même à être analysée sérieusement. Quand une armée dépend de forces étrangères, quels intérêts va-t-elle défendre ?
À l’intérieur du pays, la question linguistique, qui a mis le feu aux poudres, dans le sens direct du terme en 2014, reste toujours à l’ordre du jour – difficile de couper tout un peuple de ses racines, même la baïonnette à la main. Un Ombudsman des langues a été mis en place, non pas pour protéger le droit des minorités à pouvoir s’exprimer dans leur langue maternelle, ce qui était la norme sociale avant le Maïdan, mais pour surveiller que la diversité linguistique prenne fin et que chacun ne parle plus que l’ukrainien. Or, dans certaines régions, le russe est la langue naturelle, notamment pour les élus locaux. Ainsi, à Kharkov, au conseil municipal, l’Ombudsman a eu un choc : la moitié des élus parlait russe, l’autre ukrainien et tout le monde se comprenait sans le moindre problème. Cette paix sociale est absolument inacceptable (il est vrai que les sponsors pourraient être mécontents), donc pour renforcer la tension sociale, l’Ombudsman propose que le mandat électif soit retiré aux élus de Kharkov qui parlent russe, et d’une manière générale pourquoi pas à tout élu qui parle russe, puisqu’ils violent la loi sur la langue étatique ?
Dépenser tant d’efforts, tant de révolutions pour être colonisée, et en redemander, est bien la seule réussite de l’Ukraine post-Maïdan, même si l’on peut se demander en quoi cela est de son intérêt …