l'infos du monde de dernières minutes 7j/7

l'infos du monde de dernières minutes 7j/7

(guineenews.org)Tradition et modernité à Lélouma : à la rencontre de ces ouvriers aux métiers décadents

 (guineenews.org)Tradition et modernité à Lélouma : à la rencontre de ces ouvriers aux métiers décadents

Par ces temps qui courent actuellement, avec la mondialisation et la modernisation, les sociétés évoluent. Les activités aussi sont en proie au changement. Elles ont besoin de révision, de réajustement, bref d’une nouvelle vision et d’une meilleure façon de faire pour pouvoir évoluer avec le rythme d’une société en pleine mutation afin de tenir la concurrence déloyale au risque de passer complètement à côté de la plaque. Adulés, chéris et tant sollicités encore dans un passé très récent, la bijouterie, l’horlogerie ou encore les produits que proposaient le forgeron, le vanier, la poterie, ces métiers perdent progressivement leur éclat et cette réputation d’antan face à une modernisation sans pitié. A travers ce grand reportage, Guineenews vous promène dans quelques uns de ces ateliers et forges de ces ouvriers qui ne sont plus que l’ombre d’eux-mêmes.

Splendeur et déchéance de ces métiers qui ont rythmé le quotidien du citoyenLa bijouterie : de l’éclat aux abîmes ! Il y a quelques années auparavant, le bijoutier était l’enfant chéri, le chouchou des femmes. Son lieu de travail ne désemplissait pas. Et les clients se bousculaient pour des articles en argent ou en or comme les chaines, les boucles d’oreilles, les bracelets ou encore des bagues. Aujourd’hui tout ça s’est dissipé et n’est plus qu’un lointain souvenir. Ces bijoutiers n’arrivent plus à nourrir la famille de leur activité. Mamadou Dian Barry est bijoutier, il est dans cette activité depuis quarante ans environ. « Depuis 49 ans, je pratique ce métier. Mais aujourd’hui, compte tenu du manque de clients, je n’ouvre mon atelier qu’une fois par semaine. Il n y a quasiment pas de clients depuis que nos marchés locaux sont envahis par des articles venus d’ailleurs. Les clients se sont tournés vers ces pacotilles.C’est pourquoi, nous bijoutiers, nous sommes obligés maintenant de trouver d’autres activités pour pouvoir nourrir la famille. Notre activité est actuellement plusque menacée. Elle s’éteint progressivement au vu et au su de tout le monde. Et le plus dur dans tout ça, on ne peut rien faire à moins que le gouvernement interdit la vente de ces articles venus d’ailleurs », s’est alarmé dès l’entame le bijoutier visiblement très gené par la situation. Dans le même sillage, Maître Noumou Kanté renchérit : « nous venons ouvrir l’atelier dans l’espoir qu’un client à qui il a été recommandé d’effectuer un bracelet ou une bague en sacrifice. Car, actuellement, seules ces personnes qu’on demande de faire des sacrifices viennent vers nous », déplore-t-il. Avant de poursuivre : » les articles qu’on qualifie de modernes, nous a choppé notre vie, notre métier qu’on chérissait tant il y a quelques années. Actuellement, on est obligé de faire d’autres activités pour subvenir au besoin de la famille. Les bijoutiers que nous sommes traversent actuellement une période extrêmement difficile. Et laissez-moi vous dire que si ça continue comme ça, dans quelques années, on entendra plus parler de bijoutier ici. Et c’est extrêmement malheureux pour les communautés actuelles et celles à venir », se désole hors micro le bijoutier.

Et pire dans tout ça, les ateliers de bijoutiers se comptent du bout des doigts et sont sans apprentis. « Actuellement, il n y a que trois ateliers ici au niveau du centre – ville. Et ces lieux sont presque déserts. Moi, personnellement, je n’ai même pas d’apprenants maintenant. Personne ne veut envoyer son fils où il n y a pas d’activité. Tout le monde a fui et c’est vraiment très regrettable. Nous nous acheminons inévitablement vers la perte de cette marque culturelle, cette identité jadis célèbre », s’insurge Mamadou Dian Barry. Interpellé par rapport à la situation, une femme d’environ 80 ans nous confie : » à notre époque, les parures qu’on portaient étaient fabriquées par nos bijoutiers. C’était vraiment la belle époque. Il y avait de l’or, de l’argent qu’on traitait et qu’on fabriquait des bijoux exceptionnels. A l’époque on faisait la concurrence pour se procurer de ces bijoux. Et les bijoutiers s’en réjouissaient énormément. Aujourd’hui, c’est tout le contraire malheureusement« , explique l’octogénaire avant de poursuivre : » à l’occasion des mariages aussi, parfois certains époux donnaient du poudre d’or ou d’argent comme dot« , se souvient- elle. Nombreuses femmes interrogées par rapport à la situation nous ont confié que les articles fabriqués par les bijoutiers locaux,  coûtent beaucoup plus chers bien que plus garantis que les autres qu’on a exportés. La poterie : la modernité casse les canaris Perçu comme un véritable art pour les uns, un mode de vie, une passion et un héritage pour les autres, la poterie, ce savoir-faire ancestral résiste encore difficilement par endroits à Lélouma. Et pour cause, l’envahissement, la substitution de nos produits « made in Guinée »: couscoussiers, canaris, pots et autres jarres par d’autres objets ou ustensiles en métaux plus modernes. Cet art ne se transmet plus de génération en génération.  » Je suis sur la finition d’une jarre que j’ai entamée il y a quelques heures auparavant. Je fabrique ici divers articles comme des pots, des canaris, des couscoussiers entre autres. Je tiens ça de mes parents qui avaient été initié aussi par leurs parents. C’est une sorte d’héritage au sein de notre famille. La poterie, nous l’avons dans notre sang. C’est toujours un plaisir pour moi de manier la terre et l’argile pour en faire des ustensiles utiles. C’est ce en quoi on reconnaît notre village Saaré Boussoura », se réjouit Mariama Diallo. Quant à l’avenir de ce métier, la dame reste très sceptique : « Le manque de points d’eau, les problèmes liés à l’enclavement, l’abandon de nos produits locaux au profit du moderne, l’absence de moyens de déplacement adaptés pour le transport du produit sont entre autres les handicaps du secteur. Et pire dans tout ça, la nouvelle génération ne s’intéresse plus à notre métier. Ils sont attirés par les villes. Personnellement, aucun membre de ma famille n’a appris le métier. C’est pour vous dire qu’après nous, il n’y aura plus de poterie au sein de notre communauté. Et laissez-moi vous dire que ça va être une très grande perte sur le plan de la culture traditionnelle qui s’est perpétuée jusque là« ,  déplore la sexagénaire. A Thiahé Tormosso, une autre localité où se sont établis des communautés potières depuis belle lurette, l’émergence a cassé les canaris.  Interpellé sur cette activité, le président dudit district n’est pas allé par quatre chemins :« Ce métier, malheureusement, s’est éteint ici à Thiahé Tormosso. On a aujourd’hui perdu cette identité. Car elle ne reste que par le nom. Depuis qu’on a commencé à avoir le prix d’un sac de riz par l’entremise de nos jeunes depuis l’extérieur, les femmes ont abandonné cet héritage« , déplore Mamoudou Diao Diallo. Et de poursuivre : « Actuellement, pour avoir une jarre ou un canari, on est obligé d’aller les payer à Ninguelandé (Pita) oub ien au centre de la sous-préfecture à Parawol. C’est vraiment très regrettable surtout quand on sait que Thiahé était une référence en cette matière. Aujourd’hui c’est un métier qu’on méprise et d’ailleurs qu’on ne voit même pas de trace »,  s’est-il alarmé. Un savoir-faire local qui s’étiole À lire aussi

Dans les villages visités et les potières interrogées, la nouvelle génération n’a pas accepté de s’intéresser à la poterie. Le regard est tournée ailleurs et la plus jeune potière rencontré a au moins ses quarante ans. Une réalité qui fait mal à Mariame Diallo. «  Malheureusement, aucune de mes filles n’a accepté de suivre mes traces. Personne d’entre elles ne sait faire ce travail. Elles sont le plus souvent animées et attirées par les activités citadines ou autres préoccupations. Avec ça, dans quelques années elles vont perdre cet héritage malheureusement », se désole la femme. Faut-il aussi rappeler que le lieu où la terre et l’argile sont creusés serait sacré et que les impies ne sont pas tolérées. D’ailleurs des étrangers y viennent faire des sacrifices et des prières, nous a-t-on appris. Malheureusement, aujourd’hui, les localités sont en phase de perdre des trésors culturels énormes, faute d’appuis et de soutien. A l’allure où vont les choses, la poterie, ce savoir faire ancestral, cette identité communautaire disparaîtra dans quelques décennies si rien n’est fait. La vannerie : des plastiques dévorent les vans de rotin et de bambou Cette activité autrefois adulée, prisée et génératrice de revenus pour les personnes qui l’exercent à travers les articles traditionnelles qu’elles conçoivent est aujourd’hui menacée de disparition dans la localité. Les vanniers ont migré vers d’autres activités pour assurer leur survie. Aujourd’hui rares sont ces personnes qui exercent ce métier qui requiert de la finesse et un savoir-faire tirés de l’esprit de la créativité et de l’esthétique émanant de la culture et des mœurs traditionnelles ancestrales. Mamadou Benté Camara, vannier de son état, se débrouille tant bien que mal pour que son métier ne disparaisse pas carrément en cette période ou le modernisme a pris le-dessus. « C’est un métier que m’ont légué mes parents. Et je me plais vraiment dans ce travail mais aujourd’hui, je suis confronté à un sérieux problème pour l’exercer. Les matériaux sont difficiles à trouver. Les bambous ou le rotin se gagnent très difficilement. Pour les trouver, je dois parcourir plusieurs kilomètres. Et pour les acheminer jusqu’ici sur la tête n’est pas une chose aisée. En plus je n’ai plus la force nécessaire pour le faire. Avec l’arrivée aussi de la menuiserie moderne, bon nombre de personne opte pour les articles de cette dernière oubliant ceux traditionnels », déplore t-il. A la question de savoir s’il y a une forte demande sur son produit, à Mamadou Benté de répondre : « Quand je fais un lit en bambou, une chaise ou autres objets, ça ne reste pas longtemps avec moi. C’est pour vous dire que bon nombre de personnes aussi aiment nos produits locaux. Mais comme je vous le disais tantôt, c’est le matériel qui fait défaut ». «J’aime vraiment le traditionnel. Dans mon salon par exemple, je préfère les fauteuils, les tables et autres meubles, fruit des activités de nos artisans locaux. Je pense que c’est quelque chose qu’il faut encourager. C’est le seul moyen pour nous de valoriser ces artisans qui font un travail exceptionnel. Mais malheureusement aujourd’hui ce sont là des activités qui meurent à petit feu par manque de soutien et de promotion », explique Aïssatou Diallo. Poursuivant toujours, Aïssatou Diallo déplore l’absence de ces unités dans les marchés locaux. « Ces unités comme les vans, le pots, les ustensiles de mesure, les lits en rotin ou en bambou ou encore des chaises ou autre parures ont complètement disparu de nos marchés. C’est un métier qui s’étiole petit à petit au niveau de la commune urbaine de Lélouma ». Pour cet autre doyen interpellé par rapport à la question, tout ceci serait la conséquence de l’avancée technique à cette ère de la modernisation et de la mondialisation qui est en train d’engloutir bon nombre de métiers qui faisaient notre fierté. « Chaque chose a son temps. Avec l’avancée technique et technologique, beaucoup de nos activités traditionnelles sont en train de s’éteindre. Normalement, ce sont des métiers qu’il faut soutenir car c’est une partie de notre culture qui est en train de disparaître aujourd’hui. C’est le prix à payer. C’est la modernisation », a lancé cet autre conservateur. Les forges traditionnelles : quand les soufflets perdent le souffle Les forgerons, cette caste, onttoujours occupé une place pas la moindre dans la société traditionnelle foutanienne. Actuellement avec l’évolution de la technique, cette classe sociale est en train de perdre du terrain et de nombreux forgerons ne savent plus à quel saint se vouer. Ils ont disparu au centre – ville de Lélouma. « C’est une activité qui m’a été léguée par mes parents. Nous sommes de la lignée des forgerons. C’est ce en quoi on nous reconnaît. Mais sérieusement parlant, nous, les forgerons de la localité, sommes en train de perdre aujourd’hui cette valeur. Ces derniers temps, la demande par rapport aux objets qu’on fabrique a fortement baisé.  Notre travail n’est plus sollicité comme il l’était il y a de cela quelques années. Nous sommes en train de nous battre pour résister à cette situation qui se présente en nous. Mais c’est extrêmement difficile », reconnaît Amadou Kanté, un forgeron installé dans un quartier péri-urbain de Lélouma.

houssainatou

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Related post